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Le blog de l'Abbé Tof

Les résultats des recherches campanographiques en Saône et Loire par l'Abbé Tof

Chagny

Façade de l'église de Chagny

Vidéo en bas de page


           Ce samedi 7 mars 2009, journée que nous avions consacré à la visite de plusieurs clochers, nous nous retrouvons donc à l’église de Chagny. Le père Riffaut nous attend pour nous guider au clocher. Nous accédons à l’escalier par une porte à la droite du chœur. Nous sommes impressionnés par la largeur de l’escalier fait de pierres d’abord puis en bois très vite. Il nous emmène sur la voute du chœur. Là un escalier en bois comportant deux paliers nous emmène dans le beffroi. Au niveau du second palier, nous remarquons l’ancienne horloge qui est en très mauvais état. Nous arrivons directement dans le beffroi, juste sous la grande cloche. 

          Il faut avant tout signaler que l’ensemble du clocher de l’église Saint Martin de Chagny est classé. Il est caractérisé par son aspect trapu et massif. Il n’est pas très haut, assez large et sa flèche n’est pas très importante. Malgré ces petites proportions, le clocher est large et profond. Lorsque nous arrivons dans le beffroi, nous sommes frappés par l’espace important, malgré un beffroi massif. Nous sommes aussi frappés par la saleté du lieu. Les ouvertures du clocher quoiqu’équipées d’abat-sons, ne sont pas protégées par quelques grillages, ce qui fait que les pigeons laissent de nombreux et dommageables souvenirs… Le beffroi est, en outre, en excellent état. Il compte trois chambres. La première, par laquelle nous accédons, au Sud, la seconde au centre et la troisième au Nord. Trois cloches se partagent l’espace campanaire. Avant de nous lancer dans quelque étude que ce soit, nous dégustons, nous pouvons vraiment employer ce terme, une grande volée, c’est à dire une sonnerie des trois cloches. Nous sommes frappés par la ligne nominale peu ordinaire de l’accord des trois cloches entre elles,  marquée par les deux petites cloches s’accordant bien et le bourdon, plus grave, s’accordant peu avec ces sœurs. Une fois la volée finie, et les cloches arrêtées complètement, nous commençons nos relevés.

 

La première cloche est la plus grosse. Elle se situe dans la chambre une. Elle n’est pas au centre de cette chambre, mais plutôt à l’Est. C’est une cloche imposante de 2300kg, ce qui lui donne un son plutôt grave.
La grosse cloche

Elle se caractérise par un joug en bois massif. La couronne est composée de 6 colombettes non décorées. Juste sous le cerveau, une large frise de petites palmes orne la cloche, puis juste au dessous, une ligne d’écritures : cette première ligne débute par la représentation d’un coq, puis le texte : SIT NOMEN DOMINI BENEDICTUM au Nord et un peu plus loin, à l’Ouest : FORIS MONEO DEUS INDUS. Ensuite, ce sont quatre paragraphes de quatre à cinq lignes qui se partagent le tour de la cloche. Chaque ligne est délimitée en son début et sa fin par une étoile à cinq branches.

Voici le texte. Premier paragraphe : ligne 1 : L’AN 1835 AU MOIS DE JUIN  J’AI ETE BENITE  ligne 2 : PAR Mr CHARLES ANTOINE DUGRIVEL VICAIRE GENERAL ligne 3 : ARCHIPRETRE CURE DE LA CATHEDRALE D’AUTUN ligne 4 : ASSISTE DE Mr JACQUES AMBROISE RUILLERES ligne 5 : CHANOINE HONORAIRE D’AUTUN CURE DE CHAGNY. Deuxième paragraphe : ligne 1 : J’AI EU POUR PARRAIN ligne 2 : Mr FREDERIC MALFILESTRE ligne 3 : ANCIEN MAIRE DE CHAGNY ligne 4 : EPOUX DE DAME LAURE D’AZY . Troisième paragraphe : ligne1 : J’AI ETE FONDUE SOUS L’ADMINISTRATION DE  ligne 2 : Mr RUILLERES CURE  GILBERT JEAN MARIE LATOUR ligne 3 : ANCIEN JUGE DE PAIX JOSEPH GOBEL VERDUN ligne 4 : ANTOINE NOIROT ETIENNE VERDUREAU FABRICIENS ligne 5 : Mr PIERRE COQUEUGNIOT ADJOINT FAISANT FONCTION DE MAIRE . Quatrième paragraphe : ligne 1 : J’AI EU POUR MARRAINE DAME ANNE FRANCOISE ligne 2 : EDMEE JUSTINE SANCY FILLE DE Mr CHARLES ligne 3 : SANCY ANCIEN MAGISTRAT CHEVALIER DE LA ligne 4 : LEGION D’HONNEUR EPOUSE DE ligne 5 Mr JOSEPH DEMAIZIERE ECUYER.

Juste sous le texte, une large frise de festons style Louis XVI se caractérisant par ses nœuds en forme de soleil. Au bas de la robe, nous voyons quatre écussons : la Vierge à l’enfant, une croix de roses, un évêque (les fientes de pigeons rendent impossible l’identification) et le Christ en croix. Ces écussons sont immédiatement suivis de trois séries de trois filets (donc neuf au total). Nous retrouvons ces neuf filets répartis de la même façon sur la pince, juste sous la griffe du fondeur : Jh Ais BAUDOUIN A CHAMPIGNEULLES (52). Le battant à boule soudée est en bon état. La cloche ne présente aucune ébréchures. Elle n’a pas été tournée. Elle est équipée d’une roue de volée et d’un moteur de volée rotatif, ainsi que d’un tintement électromagnétique. Voici ses mensurations : hauteur au cerveau : 125, à l’axe : 148. Diamètre intérieur : 124, extérieur : 151. Epaisseur du bord à la zone intacte : 20, à la zone de frappe : 19. Estimation du poids : 2300kg.

 

Passons maintenant à le deuxième cloche. Elle se trouve dans la troisième chambre. Dans la chambre, elle se situe plutôt à l’Ouest qu’au centre. Vu l’aspect extérieur, nous concluons qu’elle n’est pas très ancienne. En effet, même si le vert de gris a commencé son effet, et que les pigeons contribuent aux salissures, il n’empêche que cette cloche présente des reflets cuivrés laissant présager de sa relative jeunesse. Nous découvrirons qu’effectivement, elle a été fondue en 1989. Elle remplace certainement une ancienne cloche, mais ce n’est que pure supposition car nous n’avons aucune trace, même dans les textes, comme nous le verrons.
Une particularité pour cette cloche du nom de Marie Anne est qu’elle n’a pas de couronne. La cloche est percée au cerveau. Son joug est droit et métallique, légèrement cintré ce qui fait que entre le joug et le cerveau de la cloche, nous trouvons une cale en bois. Cette cale permet d’amener le niveau du cerveau au même niveau de l’axe de balancement (et même un peu en dessous). De ce fait, Marie Anne sonne en lancé franc comme les autres. Sans cale, le cerveau se trouverait plus haut que l’axe de balancement et la volée en lancé franc ne serait plus possible, ou alors de mauvaise qualité, et il aurait été choisi un rétro-lancé. Au niveau du cerveau, nous voyons 2 filets décoratifs tout simples. Puis les lignes d’écritures réparties comme suit : cinq lignes à l’Ouest et deux à l’Est. Voici le texte : à l’Ouest : ligne 1 : MARIE ANNE ligne 2 : J’AI ETE FONDUE ET BENIE EN 1989 ligne 3 : LUDOVIC REBILLARD ETANT CURE ligne 4 : DANIEL MALINGRE ETANT MAIRE ligne 5 : CHAGNY. A l’Est : ligne 1 : ANDREE MONNOT MA MARRAINE ligne 2 : JOSEPH DELORME MON PARRAIN. A l’Est, un écusson représente une croix glorieuse.   En bas de la robe, nous trouvons trois filets. Entre le deuxième et le troisième, nous trouvons le nom du fondeur : CORNILLE HAVARD à Villedieu les Poêles, puis quatre petites crois de bénédiction.

La cloche est en bon état, ne présentant aucune ébréchure. Comme ses deux sœurs, elle est équipée d’une roue de volée et d’un moteur ainsi que d’un tintement électromagnétique. Ses mensurations sont les suivantes : hauteur au cerveau : 82, à l’axe : 86. Diamètre intérieur : 81, extérieur : 99. Epaisseur du bord à la zone intacte : 7, à la zone de frappe : 6,8. Estimation du poids : 580kg.

 

Nous passons enfin à la troisième. Elle se trouve dans la chambre centrale. Comme la seconde, elle est décalée légèrement à l’Ouest. Cette cloche est la plus ancienne des trois puisqu’elle date de 1489.
Du reste, nous constatons que sa ligne diffère légèrement des cloches plus récentes (à partir du 19° siècle). Ces dernières présentent des lignes assez droites, des angles aux arrêtes vives. Pour cette vieille dame là, les lignes sont plus approximatives. Il n’y a pas d’arrête bien dessinée, mais tout est arrondi.

Cette cloche possède une couronne, mais du fait qu’elle est fixée à un joug métallique légèrement cintré, entre la couronne et le joug il y a aussi une cale en bois, pour ramener l’axe de basculement au niveau du dessus de la couronne. Cette cloche étant très ancienne, et les pigeons ayant laissé de nombreux souvenirs au fil des siècles, il est presque impossible de déchiffrer les écritures, en gothique. Nous avons eu recours à un ouvrage qui nous a été prêté, par chance. Nous voyons quatre filets au cerveau, puis deux lignes d’écritures dont voici le texte. La première ligne commence par une croix : ligne 1 : + L’AN MIL CCCC IIII XX ET IX DE IX CENS POUR SONNER LES HURES NUIT ET JOUR FU FAICTE ligne 2 : PAR LES HABITANTS DE CHAGNY ANSAMBLE MONSIEUR DE SAFRE ET DAME IEHNE DE REY ME FIT. Contrairement à ce que l’on peut penser, il n’y a ni faute de relevé ni faute de frappe. Pour la date, il existait plusieurs façons de compter. Ici nous avons Mil pour 1000. CCCC pour 400. IIII XX pour quatre-vingt (4 x 20) et IX pour 9. Il suffit ensuite de tout additionner. Les 9 Cens qui suivent ne relèvent pas de la date mais probablement du coût de la cloche. Le Cens était un impôt au moyen âge, ce qui laisse à pense que les 9 Cens ont servi à payer la cloche…Ces inscriptions sont les seules que nous pouvons déchiffrer de visu et aussi grâce à l’ouvrage que j’évoquais précédemment. La cloche n’est pas fêlée mais présente de nombreuses ébréchures à la pince. Elle a en outre été tournée d’1/4 de tour, ce qui lui fait présenter une bélière (pièce servant à accrocher le baudrier du battant) qui a dû être bricolée pour palier ce quart de tour. Ses mensurations sont les suivantes : hauteur au cerveau : 70, à l’axe : 81. Diamètre intérieur : 72, extérieur : 91. Epaisseur du bord à la zone intacte : 7,2, à la zone de frappe : 5,7. Estimation du poids : 530kg.

 

Notre visite prend fin après ces relevés et la volée des 3 cloches :

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